A la perchaine, Jean-Louis Latour

C'est avec une grande tristesse que nous apprenons ce mardi 6 juin 2017 le décès de Jean-Louis Latour, qui a notamment été président de Kendalc'h de 1986 à 1995 et a participé activement à la construction du premier centre culturel breton Ti Kendalc’h.
A la perchaïne, Jean-Louis, en t’ermerciant pour tout ce qe tu nous laisses.

Jean-Louis LATOUR

Né le 25 mai 1935 à Morlaix (Léon-Trégor), Jean Louis-Latour est issu d’une famille citadine, de marins (XIXème), militaires et commerçants. Marié à Marie-Christine il est père de quatre enfants, Kireg, Gaëlle, Nolwenn et Anaïg.

Il est profondément marqué par la guerre de 39-45 où son frère aîné, alors âgé de 17 ans, est blessé. En janvier 1943, une bombe tombe sur son école de Morlaix et provoque la mort de 40 enfants. Très traumatisé par cet événement ses parents décident de l’envoyer dans une ferme de Plouëgat-Guerrand où il s’imprègne totalement du breton. En octobre 1945, à Redon, il découvre le gallo, avant d’obtenir son bac Philo à Nantes. Effectuant son service militaire en 1957/60 à la FNSEA comme formateur pour les « Français de souche nord africaine », il y approche la culture musulmane.

Signataire en 1957 du POB (Projet d’Organisation de la Bretagne), il adhère au MOB avant d’intégrer l’Education Nationale comme conseiller d’éducation. En 1960, il rencontre Albert Poulain avec qui il fait équipe pendant de nombreuses années, collectant et chantant les textes qu’ils recueillent au fil de leurs rencontres. Il chante ainsi en festoù-noz et concerts jusqu’en 1985 (réalisation du premier disque de chants traditionnels gallos du Pays de Redon). De 1965 à ce jour il est, parallèlement, militant d’action touristique (président de l’OTSI de Redon pendant 13 ans). Il a obtenu la médaille d’argent du tourisme pour la défense de l’idée bretonne et sa culture.

Secrétaire de Kendalc’h en 1965, il participe à la construction du centre Ti Kendalc’h en tant que responsable bénévole avec sa femme Marie-Christine. En 1985 il prend la présidence de Kendalc’h et entre au Conseil Culturel de Bretagne dont il deviendra président, succédant à Per Denez, de 1993 à 2003. Il intègre le Conseil Economique et Social en octobre 1998 en tant que représentant de la culture.

Source : Institut culturel de Bretagne, à l'occasion de la remise du Collier de l'Hermine en 2003 à Saint-Malo
Photo : Keleier - la lettre d'info de Kendalc'h - 1986

 

Lettre d'Augsbourg à Jean-Louis Latour

Jean-Louis, lors de mon départ vers Augsbourg
vers la ville où, Jakob Fugger créa, de 1514 à 1523,
la première cité de logements sociaux du monde
aux 140 appartements répartis en  67 maisons
et au loyer annuel immuable,depuis, de" de 4 sous";
vers la ville de Luther  et de Berthold Brecht
où fut reconnue, en 1555, la liberté de conscience
par sa paix entre Protestants et Catholiques
où naquit le grand dramaturge allemand
ennemi juré dès l'origine d'Adolphe Hitler
et où on se souvient de Marcel Callo, le déporté
je savais que nous ne  nous reverrions plus.

Ton âme avait déjà quitté  ton corps.
comme celle de l'ami Prosper Divay
quelques jours auparavant
le conteur d'images, le poète inspiré
le chantre des Pays de vilaine,
qui t'avait profondément bouleversé.

A Augsbourg, j'ai retouvé  les traits de ton être:
l' amour de l'autre, de la personne dans son identité
et ton soutien résolu aux humbles, aux  démunis
incarnés par ton  engagement dans l'éducation
à l'école, dans les foyers de jeunes et centres sociaux

Ici j'ai retrouvé aussi l'écho de ton attachement,
chevillé au corps, à la liberté de penser, à la tolérance,
au respect et partage des différences
magistralement incarnées par ton engagement
pour la reconnaissance des cultures populaires,
de leurs langues et différentes formes d'expression,
qu'elles soient de Bretagne, d'Europe ou du monde entier
pour qu'elles vivent, s'enrichissent mutuellement  et se renouvellent.

Merci, Jean-Louis, l'ami, le compagnon de route en pays de Redon
d'avoir contibué à me faire aimer encore un peu plus la Bretagne
haute et bassse, dans ses diversités, ses ressorts et ses valeurs.
Merci, Jean-Louis, de m'avoir accompagné dans les actions de développement
touristique et culturel du  territoire qui t'ont amené à découvrir, lors d'un voyage d'études  inénarrable, à aimer Périgord, Cévennes et Languedoc, où tu aimais depuis à te ressourcer.
Jean-Louis, tu étais un homme  impressionnnant par ta stature, tel un châtaignier greffé,
par  ton regard aiguisé et pénétrant, mais tu cachais sous cet aspect, cette carapace,
une forme de timidité, une sensibilité à fleur de peau, une quête permanente de l'excellence.
C'est cette  recherche là qui t'habitait dans tous les domaines, te taraudait parfois,
jouant sur ton  humeur. Mais quand elle aboutissait, quelle joie, quel bonheur, tu savais exprimer, partager: art roman, chant,oralité contée,  danse et musique populaires, arts de la table et littérature!

Merci Jean-Louis d'avoir su tirer vers le haut  notre pays de choix, notre pays  de coeur.
Kenavo, l'ami !

Jean-Bernard Vighetti le 09/06/2017 (revu le 15) à Augsbourg